13 Sentinels Aegis Rim est un mélange original de visual novel (ou de jeu d’aventure qui a un déroulement très proche), et de RPG tactique.
L’histoire est un peu à la Evangelion : des « kaijus » débarquent d’on ne sait où pour tout détruire et éliminer l’humanité, et c’est à quelques lycéens d’utiliser des robots géants, appelés sentinelles, pour les éliminer ; les 13 personnages du titre verront leurs destins se croiser et s’entremêler pour faire face à l’envahisseur une bonne fois pour toute. La manière dont est racontée l’histoire semble, quant à elle, plutôt inspirée des films de Tarantino : on saute sans arrêt d’un personnage à l’autre, mais aussi d’un événement à un autre, sans que ce soit toujours raconté dans le sens chronologique, plus le fait qu’on passe son temps à voyager entre passé, présent et futur, plus les nanomachines et les clones un peu partout, sans parler des flashbacks qui se déroulent parfois dans le futur, hé oui, puisqu’on voyage dans le temps ! Après quelques heures j’étais complètement largué, et pourtant chaque changement est lié par un événement ou un personnage, que l’on va recroiser plus tard avec un autre point de vue ; et surtout, tout est expliqué à la fin, ce qui ne semble pas gagné au début, d’autant plus que le jeu adore nous fournir des fausses pistes et des informations qui semblent contradictoires.
Avec autant de complexité, on pourrait craindre une certaine dilution des personnages, mais il n’en est rien : ils sont tous importants, ils ont tous leur rôle à jouer, et pas un seul ne donne l’impression d’être accessoire ; ils sont souvent des clichés mais pas trop prononcés, et ont généralement une bonne progression de personnalité. Et si vous êtes trop perdus, il est possible de regarder les événements de manière chronologique dans une galerie bonus, afin de remettre de l’ordre dans vos pensées.
Le gameplay durant les phases d’aventure est très basique : on se balade dans l’écran, on interagit avec les éléments ou personnages qui affichent une icône d’interaction, ce qui débloque des mots-clés qui permettent d’interagir avec autre chose un peu plus loin, ou d’y « réfléchir » pour, par exemple, déclencher un flashback, ou ouvrir de nouveaux dialogues. Ces icônes sont d’ailleurs plutôt pratiques pour comprendre ce que l’on peut faire : tout est bien indiqué, on voit tout de suite lorsqu’un PNJ n’a plus rien à dire, ou que l’on peut « réfléchir » à un mot-clé dans les pensées : pas besoin de cliquer partout en espérant que ça finisse par débloquer quelque chose, contrairement à Yu-No par exemple. Ca n’empêche pas que la progression ne soit pas toujours très claire, par exemple lorsqu’il faut juste écouter les conversations d’un groupe de personne en restant à côté sans rien faire.
On peut suivre les histoires des personnages dans l’ordre que l’on veut, à l’exception de moments où il faudra faire certaines actions pour débloquer la suite : impossible de « finir » l’histoire d’un personnage sans avoir un minimum progressé dans les histoires des autres, ou dans la partie RPG/combats. Les histoires de chaque personnage sont elles-mêmes découpées avec des embranchements, mais ce n’est que de la poudre aux yeux : à quelques exceptions près, vous ne pourrez faire qu’un seul embranchement à la fois, car vous aurez besoin d’un mot-clé débloqué par la séquence A pour accéder à la séquence B. Il faudra donc refaire certaines séquences en boucle pour débloquer tous les chemins, mais heureusement ce n’est jamais très long, et les actions nécessaires pour débloquer la suite sont généralement suggérées. Le jeu est d’ailleurs tellement linéaire durant sa petite trentaine d’heures, qu’il n’a qu’une seule fin, ce qui est assez surprenant pour ce style.
L’autre « grande » partie du jeu, ce sont les combats : situés chronologiquement à la fin de l’histoire, on doit les faire progresser en parallèle de la partie aventure, car certains événements sont « verrouillés » derrière certains combats. Ce sont des affrontements où l’on dirige jusqu’à 6 sentinelles contre des kaijus de divers types, qui se déroulent en temps réel jusqu’à ce que l’on sélectionne un personnage : à ce moment le jeu s’arrête pour nous laisser choisir une action, et le cours du temps reprend lorsque l’action est terminée ; c’est donc un mélange de temps réel et de tour par tour. Chaque personnage a un type de robot parmi 4, et chaque type a sa spécialité : combat au corps à corps, à distance, aérien ou support, plus la possibilité de personnaliser l’armement et les caractéristiques en « achetant » des améliorations avec une sorte de monnaie que l’on gagne en éliminant les ennemis, et qui fait donc office de points d’expérience que l’on peut grinder en refaisant d’anciens combats, en difficulté plus élevée si l’on veut.
L’organisation des combats ressemble un peu à du tower defense : les ennemis apparaissent aux alentours d’une carte de taille assez restreinte, et on doit protéger un point central, en planifiant son chemin dans les rues de la ville. Les ennemis sont relativement variés avec différentes forces et faiblesses, ils apparaissent en grand nombre et régulièrement, mais comme les batailles durent quelques minutes à peine, cela leur donne un rythme haletant. Cela dit, en mode facile, on peut faire un peu n’importe quoi et gagner quand-même, ce qui n’est pas passionnant, mais très bien pour quelqu’un qui n’est pas fan de stratégie comme moi. Dans l’ensemble les combats sont très corrects sans être extraordinaires, mais soyons honnêtes : s’il n’y avait pas la partie « aventure » autour et qu’il n’y avait que les combats, ce serait un jeu assez moyen, et c’est vraiment l’imbrication des deux qui rend le tout si sympathique.
Graphiquement le jeu est très joli : le look très particulier « Vanillaware » est très joli, avec des dessins agréables, beaucoup de détails et de jolis effets de lumière, et aucun temps de chargement. En revanche, les phases d’action jurent avec leur style vectoriel et assez abstrait, c’est vraiment dommage, mais au moins c’est lisible.
Le jeu est doublé en anglais ou japonais avec les textes en français, assez perturbant car les textes français ne correspondent pas toujours exactement aux doublages anglais ; j’imagine que la traduction française repart du japonais. On ne peut cependant pas leur reprocher une mauvaise qualité, au contraire, les textes sont traduits avec passion : en témoigne la conservation des suffixes « kun », « chan », « san », etc, qui complexifient la compréhension mais clarifient les relations, ou encore des explications, comme un surnom qui joue sur le double sens d’un kanji qui est détaillé dans le codex.
13 Sentinels Aegis Rim est un mélange original d’aventure et de tactique, avec une histoire complexe et prenante, et des combats corrects. L’ensemble est supérieur à la somme de ses parties, et mérite sérieusement votre attention.