Ys Origin est une préquelle à la série Ys, considérée comme l’un des « parents » de l’Action-RPG dans les années 80, aux côtés de Hydlide et Dragon Slayer. Il est sorti sur PC en 2006 au Japon, la même année que Final Fantasy XII, Kingdom Hearts 2, Oblivion ou Titan Quest, et il s’inscrit dans une « renaissance » de la série sur PS2 dans les années 2000, aux côté de remakes des cinq premiers épisodes. Il n’a cependant été localisé qu’en 2012, ce qui n’est pas très étonnant pour une série souvent restée confinée au Japon, et ne sortira progressivement sur consoles qu’à partir de 2017.
La série principale raconte les aventures de Adol qui recherche des artefacts du pays d’Ys, qui a disparu depuis longtemps ; Ys Origin raconte ce qui s’est passé lors de cette disparition. Pour résumer, des démons sont arrivés, les déesses locales ont élevé leur ville dans les airs pour leur échapper, les démons ont construit une tour immense juste en-dessous, les déesses y ont disparu, et on est chargé d’explorer la tour pour comprendre ce qui se passe. J’imagine que c’est bien plus intéressant lorsque l’on connaît déjà la série, mais il est possible de l’apprécier quand-même lorsque, comme moi, on n’y a jamais joué.
Au début du jeu, on nous propose le choix entre deux personnages : Yunica la jeune ingénue qui manie la hache, et Hugo le prodige de la magie prétentieux et aigri. Dans les deux cas, la tour à explorer est identique, les boss sont souvent les mêmes (mais pas tous), mais les gameplays sont totalement différents — Yunica se bat au corps à corps tandis que Hugo tire à distance — et les histoires sont sensiblement divergentes : les grandes lignes sont identiques, certains événements que l’on ne comprend pas dans une histoire sont expliqués dans l’autre, et on explore réellement ces deux personnages qui nous éclairent différemment sur les motivations des alliés et ennemis. Lorsque ces deux histoires sont terminées, un troisième personnage se débloque, qui fait office de « vraie histoire » et donne un point de vue totalement nouveau : la trame principale est toujours la même mais le déroulé précis n’a plus rien à voir, les événements antérieurs à l’arrivée dans la tour sont enfin développés, et le grand méchant générique (qui est méchant parce qu’il est méchant) prend une toute autre dimension. Grâce à tous ces changements, c’est un vrai plaisir de découvrir ces autres points de vue alors que d’habitude je déteste ça, d’autant plus que le jeu n’est pas très long : mon premier « run » en normal m’a pris 9h30, mes deux suivants en facile ont duré 7h et 5h30.
Le gameplay de Ys Origin est simple : une frappe qui fait des combos automatiquement, un saut, un pouvoir à activer parmi trois, et… c’est tout. Il y a bien quelques subtilités, comme les attaques sautées qui étourdissent l’ennemi ou des coups puissants, mais il n’est absolument pas nécessaire de les maîtriser pour terminer le jeu. Le gain de niveau est automatique, l’inventaire est minimaliste, le mana remonte tout seul, la vie est restaurée aux points de sauvegarde, les ennemis réapparaissent dès que l’on ressort d’une pièce, bref, on est vraiment dans l’Action-RPG très accessible ; Cat Quest s’en rapproche d’ailleurs énormément, et même si les développeurs de ce dernier disent s’être plutôt inspiré de Zelda, la ressemblance est frappante. Les combats sont très efficaces et plaisants à jouer, les ennemis très variés et présents en combinaisons intéressantes qui obligent à adapter les stratégies, et les boss sont très bons, même si parfois un peu brouillons. Après trois jeux basés sur le même moteur, et presque 20 ans à créer des RPG d’action, on sent que Falcom maîtrise son sujet.
Ys Origin est un dungeon crawler, c’est à dire que l’on explore un donjon « fermé » avec de nombreux niveaux, sans jamais voir la lumière du jour, sauf quand on passe sur un balcon. La tour que l’on explore est un vrai labyrinthe, avec des couloirs et des arènes de combat, des passages de plateforme, des portes dont il faut chercher la clé, et des interrupteurs à activer : il vaut mieux aimer les allers-retours dans les salles pour chercher la bonne séquence d’actions. Heureusement, les niveaux ne sont pas trop complexes, et au pire on devra mémoriser les trois ou quatre dernières salles ; on ne reste jamais bloqué bien longtemps car il suffit de refaire toutes les salles accessibles pour trouver ce qu’on a oublié. Je suis resté coincé une seule fois car il fallait revenir à un autre endroit parler à un PNJ spécifique en étant équipé d’un objet spécifique, mais le reste du temps, le level design a un très bon équilibre entre réflexion et simplicité.
La difficulté est également très bien gérée : le niveau facile est réellement facile, et le niveau normal offre un peu plus de challenge tout en restant parfaitement abordable ; dans tous les cas, le grind est assez léger à partir du moment où on ne s’enfuit pas de tous les combats, et quasiment inexistant en mode facile. Les points de sauvegarde remontent la vie, ils ne sont pas très fréquent mais on peut s’y téléporter à n’importe quel moment, et ils sont présents avant et après chaque boss : perdre contre un boss permet de redémarrer immédiatement, sans chargement, et sans cinématique, ce qui est absolument génial. Le seul point noir est l’impossibilité de faire pause sur les boss : quand on voit qu’il nous manque un ou deux niveaux, et qu’on veut retourner grinder un peu, on est obligé de se laisser mourir, ou de relancer le jeu.
En tant que jeu à moyen budget de l’époque PS2, Ys Origin ne brille pas par ses graphismes : les décors sont basiques, les textures très répétitives, et à part certain boss, les personnages et ennemis sont des sprites en 2D. Cela dit, cette version de 2020 a des textures très propres, et les sprites sont bien détaillés malgré leur petite taille, avec beaucoup d’animations. Globalement c’est honnête, mais pas renversant. Au moins c’est lisible, et la caméra est parfaitement placée pour que les passages de plateforme ne posent jamais de problème.
Les musiques quant à elles sont excellentes, un mélange original de classique et de rock très bien adaptées au jeu. Mention spéciale à l’introduction, doublée en « français » (hommage à la légende Bretonne qui a inspiré la série) par une Japonaise qui n’a absolument aucune idée de la manière dont se prononcent les mots : c’est totalement incompréhensible, et tellement mauvais que ça en devient hilarant.
Ys Origin est un excellent Action-RPG / dungeon crawler sans prétention, très efficace et agréable à jouer. La nécessité de le terminer trois fois pour en voir la « vraie fin » ne posera aucun souci au vu de la courte durée de vie, des trois histoires vécues totalement différentes, et du level design qui se mémorise très bien.