Okami est un croisement entre un Zelda-like et un JRPG.
Il propose de parcourir un Japon envahi par les yokais (des esprits méchants) et de restaurer la puissance des kamis (des esprits gentils). Pour résumer rapidement, il y a 100 ans, le dragon Orochi a été vaincu par un loup blanc et un guerrier, et aujourd’hui, Orochi se libère et on incarne un loup blanc qui va chercher un guerrier pour le vaincre de nouveau.
On va donc voyager de région en région, visiter des villages et des « donjons », afin d’en éliminer la corruption, faire fleurir les arbres, et libérer les kamis prisonniers, jusqu’à affronter de nouveau le dragon Orochi, à l’aide de votre pinceau céleste.
L’histoire est assez bonne, et s’appuie énormément sur la mythologie Japonaise et la religion shintoïste ; c’est très sympa, mais lorsque l’on ne connaît pas beaucoup ces aspects, on est assez vite largué. Ça donne un côté mystérieux à l’ensemble, mais ça peut parfois paraître assez impénétrable. La fin devient progressivement assez délirante, et on ne sait pas trop ce qui est traditionnel ou moderne.
Le bestiaire est également totalement inspiré de la mythologie Japonaise, avec des créatures difformes et grotesques parfois tout droit sorties d’estampes.
Okami a un ton général très léger, et est bourré d’humour partout, à tous les niveaux, et sans arrêt : que ce soient des vannes, des situations, des personnages, ou des comportements, le jeu ne se prend jamais très longtemps au sérieux, excepté sur la fin du jeu. C’est très « Zelda-esque » à ce niveau, avec des situations absurdes, et des personnages caricaturaux. L’humour alterne entre le bouffon pour enfants (comme des personnages qui chutent) et le mature (avec des remarques salaces) ; le global n’est pas mauvais si on supporte les côtés plus « enfantins ».
La première approche du jeu fait énormément penser à Zelda Ocarina of Time. Pour tout dire, on a l’impression qu’il a commencé son développement en tant que Zelda (Capcom ayant développé plusieurs épisodes sur portable, ça ne serait pas étonnant), et modifié par la suite pour utiliser une autre IP et introduire d’autres mécaniques.
Le gameplay est un peu simple, à base de martelage de 2 boutons : une attaque principale, une attaque secondaire, et une esquive, si on prend le temps de la débloquer. Les « combos » sont simplement une augmentation du nombre de coups possibles à la suite, il n’y a pas de technique spéciale à apprendre.
Les combats se déroulent dans des « arènes » : lorsque l’on touche un esprit flottant dans le monde (ou à certains endroits scriptés), un combat se déclenche, et les ennemis apparaissent dans une zone fermée. C’est assez étonnant si l’on prend le jeu comme un Zelda-like, moins si on le considère comme un JRPG.
Le « gimmick » principal du gameplay de Okami, c’est le fameux pinceau. Un appui sur R permet de figer l’action, et de faire des dessins, avec le stick, le tactile, ou en motion control avec les joycons (sur Switch). Les dessins sont basiques (traits, cercles, spirales, etc) et ont des effets variés selon les formes et les cibles : un cercle autour d’un arbre le fera fleurir, mais dans le ciel, cela fera apparaître le soleil, par exemple.
C’est un concept intéressant, mais cela casse un peu le rythme du jeu, car à chaque utilisation, on met le jeu en pause, on fait un dessin, puis une cinématique se déclenche. Les dessins ne sont pas très précis, et l’utilisation n’est pas toujours très intuitive : par exemple, un trait pour trancher devra uniquement se faire horizontalement, un trait vertical ne fera rien. On s’y reprendra parfois à plusieurs fois pour réussir un dessin sans trop comprendre ce qui n’a pas marché les premières fois ; durant certains combats de boss, qui ne subissent pas toujours l’arrêt du temps, ça peut devenir assez pénible.
Okami possède également quelques éléments de RPG : un gain d’XP (ou presque), de l’augmentation de caractéristiques, différentes armes, etc. C’est assez léger et pas beaucoup plus important que dans un Zelda, mais ça permet au jeu de se démarquer de ce dernier.
Il y a un certain nombre de systèmes obtus et obscurs, des chiffres, des compteurs et des jauges partout, mais beaucoup de choses ne sont pas ou mal expliquées. La vie et la peinture sont assez claires, mais le bonheur ? L’estomac ? Les animaux à nourrir, qu’on nous incite à faire sans nous en expliquer l’utilité ? Il suffit d’ignorer les choses que l’on ne comprend pas jusqu’à ce que ce soit mieux expliqué, mais c’est assez frustrant, on ne sait jamais si on passe à côté de quelque chose d’utile ou d’important.
Le level design est assez bon, et les instructions pour avancer sont généralement claires. Les blocages où l’on ne sait pas quoi faire sont assez rares, à l’exception de quelques moments : par exemple, pour progresser dans l’histoire, il vous faudra à un moment acheter un objet à un PNJ que l’on ne croise pas forcément.
La seconde moitié du jeu se complique un peu, notamment pour certaines quêtes secondaires pas toujours très claires. Mais en général, si vous parlez à tout le monde, vous aurez suffisamment d’indices pour vous débloquer. La fin du jeu comporte quelques trucs tordus, mais pour une fin de jeu, c’est un peu normal.
On imagine un monde très grand lorsque l’on est au début et que l’on ouvre la carte globale vide, mais ne vous excitez pas trop : les zones ne sont pas aussi nombreuses que ce que l’on pourrait croire, et la carte restera vide aux 3/4 à la fin du jeu.
Ce n’est d’ailleurs pas un open world moderne – le contraire aurait été étonnant sur PS2 – et le monde est découpé en succession de petites zones, comme Zelda OoT. Certains environnements sont d’ailleurs assez fermés et pas très grand, limite claustrophobiques.
Il y a quelques « donjons », mais on est loin du compte de Zelda, et ils sont plus simples, plus linéaires, et comportent moins de puzzles. Ne vous attendez pas à des trésors d’ingéniosité, même si certains sont sympas et originaux, la plupart sont assez basiques, et il y en a même des plutôt ennuyeux.
Pour ceux qui aiment ça, le monde est parsemé de secrets un peu partout, et il y a des centaines de choses à faire et de trucs à collectionner : coffres et perles à déterrer, poissons à pêcher, trèfles à quatre feuilles, animaux à nourrir, arbres à fleurir, etc.
Okami est long et lent. La première arme secondaire s’obtient après 3h de jeu. Le premier donjon se rencontre après 4h. Après ce donjon, la moitié du menu est toujours composé de « ??? », alors qu’on n’est pas vraiment bombardé d’infos jusque là. A un moment, on se dit qu’on arrive à la fin, et en fait ce n’est même pas le milieu. Il y a beaucoup de cinématiques. Ca traîne en longueur, et sur un jeu qui se termine en environ 26h sans faire de quêtes secondaires, c’est assez problématique.
Il y a par ailleurs un problème de rythme dans la succession d’événements. On nous dit qu’on peut améliorer les armes avec de l’or, plusieurs heures avant de rencontrer le premier marchand qui en vend. On nous dit comment obtenir des « crocs de démon », plusieurs heures après avoir croisé le PNJ qui les accepte, et alors même que l’on aurait pu le faire quasiment depuis le début.
Un petit « compactage » des événements aurait permis d’avoir un jeu un peu plus rythmé ; en l’état, on est souvent au bord de l’ennui.
Graphiquement, le jeu est très joli, même en 2019. Le style « cellshadé » (réglable) est bien fait, et permet de masquer les modèles avec peu de polygones et les textures simples. Il y a de nombreux effets qui rendent le jeu relativement modernes. Il n’est bien évidemment pas au niveau des AAA actuels, mais il reste plus que correct.
Il y a cependant quelques techniques un peu vieillottes comme les arbres en 2D qui restent face à la caméra.
Il y a cependant parfois des modèles « pas stables » (qui semblent se déformer) à cause du cell shading, et il y a un effet de « popping » assez aléatoire : parfois les arbres et rochers apparaissent un peu au loin, et j’ai pu observer des jarres qui ne sont apparues à l’écran qu’une fois que j’avais le nez littéralement dessus.
Les musiques sont vraiment très bonnes, d’inspiration Japonaise traditionnelle. En revanche, si on n’aime pas le style, elles risque de vite taper sur vos nerfs. Une seule est pénible : celle qui sert « d’ambiance inquiétante », qui est une boucle de 15s, utilisée assez parcimonieusement… sauf dans un donjon, où elle sert de musique principale pendant de longues minutes.
Les dialogues à base de « bruits » sont à la limite de l’insupportable, notamment parce qu’on ne peut pas les accélérer durant les cinématiques ; heureusement qu’il est possible de le faire durant les dialogues « normaux ».
Enfin, et en vrac, quelques reproches.
Le jeu n’est pas très stable (sur Switch) et j’ai subi 2 plantages complets du jeu. N’oubliez pas d’utiliser plusieurs emplacements de sauvegarde.
Il manque un réglage de vitesse de la caméra, qui est très lente. Pour une quatrième version du jeu, c’est assez incompréhensible, d’autant plus qu’elle est bien pénible, notamment durant certains combats contre des boss.
La maniabilité n’est pas toujours très précise, ce qui ne pose pas de problème dans la majeure partie du jeu, sauf sur la fin, où il y a des passages de plateforme, qui deviennent vite frustrants.
Certaines choses sympathiques, comme l’apprentissage des techniques dans un dojo avec un sensei, deviennent vite pénibles, car on ne peut pas les accélérer. Apprendre plusieurs techniques à la suite est un vrai calvaire d’attente de dialogue interminable et répétitif.
Le jeu n’est pas très dur de manière générale ; je n’ai pas perdu une seule fois, alors que je ne suis pas un très bon joueur. Quelques combats sont un peu plus tendus, mais pas beaucoup.
Okami est un jeu sympathique, mais le cul entre deux chaises, car il n’a pas assez de donjons et de puzzles pour être un bon Zelda-like, et il n’a pas un gameplay assez profond et complexe pour être un bon JRPG.