Lors de son annonce, Immortals Fenyx Rising marque les esprits par sa ressemblance avec un certain Zelda Breath of the Wild : look, ambiance, pouvoirs, tout semble repomper la formule du jeu à succès. Il est difficile d’en nier l’influence, mais est-il réellement un « clone inférieur », ou cette réduction risque-t-elle de vous faire passer à côté de son intérêt ?
Difficile de passer à côté de ce qui est recopié : jauge d’endurance, « longue vue » comme sur la tablette Sheika, le pouvoir de « force » pour déplacer les rochers, les failles un peu partout qui occupent la même fonction que les sanctuaires de Zelda… Mais malheureusement, tout ce qui a été copié ne l’a été que superficiellement : l’endurance n’a pas grande utilité ; la « longue vue » repère automatiquement les coffres à travers les montagnes ; le pouvoir de « force » est juste une manière un peu chic de déplacer des rochers ; les failles sont très répétitives… Certains noteront aussi les ailes, qui font penser à la paravoile de Zelda, mais aussi au parachute de Assassin’s Creed Brotherhood ou à la wingsuit de Far Cry 3.
Mais à mon sens, la plus grosse lacune de Immortals face à Zelda, c’est sur le level design : là où Nintendo a porté une attention extrême aux détails pour toujours donner des indices dans le décor sur l’emplacement des secrets, Ubisoft semble se contenter d’amonceler des montagnes et rochers au hasard, et trouver des coffres qui ne sont pas marqués sur la carte relève plus de la chance que de l’observation : l’exploration est beaucoup moins naturelle, et beaucoup plus fastidieuse.
J’aime beaucoup la série Assassin’s Creed malgré tous ses défauts, mais il faut bien avouer que c’est un peu toujours la même chose, et Immortals est clairement coulé dans le même moule, saupoudré de quelques éléments tirés de Zelda : si vous n’aimez pas les jeux Ubisoft, ce n’est pas celui-ci qui vous réconciliera ; mais l’inverse est aussi vrai, et un fan de AC appréciera certainement ce jeu-ci.
Immortals Fenyx Rising raconte une histoire plongée dans la mythologie Grecque : Typhon, un Titan, se libère du Tartare et emprisonne ou transforme les dieux. En tant qu’humain, une tempête nous fait échouer sur leur île, qu’on va devoir explorer pour récupérer des trucs afin de les délivrer, et pouvoir affronter le grand méchant. Rien de très original, mais le tout est raconté avec un ton léger et un peu d’humour, notamment par les voix off qui commentent tout ce qui nous arrive d’important, ce qui n’est pas désagréable. Les références aux mythes sont nombreuses, et le tout est raconté par Prométhée et commenté par Zeus (doublé par Lionnel Astier) qui donne son point de vue « divin » et décalé sur ce qui s’est passé.
La carte, de taille moyenne, est découpée en zones indépendantes et peuplées de monstres, sans aucun PNJ : pas de village, de magasin ou simplement de gens vaquant à leurs occupations, il n’y a qu’une petite zone qui permet d’améliorer ses compétences et de parler aux 5 dieux qui nous donnent des quêtes, et des ennemis partout ailleurs. Ces quêtes, comme toujours chez Ubisoft, sont toujours guidées avec un marqueur sur la carte, et très basiques : aller chercher un objet, éliminer un ennemi, et… c’est à peu près tout, sans parler des « quêtes quotidiennes » encore plus génériques.
Sur le chemin, comme dans tout open world Ubisoft, on croisera environ 3 milliards de coffres et autres collectibles à ramasser, mais la plupart sont bien cachés ou nécessitent de résoudre une petite énigme ; ils peuvent facilement mettre 15mn à être ouvert, ce qui est très vite lassant au vu de leur nombre et de la répétitivité des actions : des blocs à pousser et déplacer malgré une physique parfois aléatoire, des flèches enflammées à diriger, des ennemis à éliminer, et c’est à peu près tout. On croisera aussi des « failles », plus ou moins équivalentes aux sanctuaires de Zelda BotW, souvent plutôt orientées puzzle ou plateforme, qui peuvent elles aussi mettre un très long moment à être résolues, et ne donnent que des fragments de petite amélioration : on aura vite fait de les laisser de côté, malgré la qualité de certaines énigmes.
Les combats de Immortals Fenyx Rising sont une repompe de celui des derniers Assassin’s Creed, en un peu plus mobile et acrobatique : des coups rapides ou forts, un arc, des blocages et une esquive. On peut également s’accroupir dans un buisson pour être invisible aux ennemis, comme dans AC, mais ce n’est pas vraiment exploité. En revanche, il n’y a pas vraiment d’expérience ni de niveaux, juste des fragments d’amélioration à récupérer un peu partout comme dans un Zelda, à la différence qu’il faut revenir au hub central pour pouvoir les utiliser, ce qui est vite fastidieux. L’équipement est moyennement varié, avec seulement deux types d’armes (l’épée pour les coups rapides et la hache pour les coups puissants) aux statistiques identiques (la puissance dépend des améliorations du personnage) mais des bonus uniques divers, répartis sur une grosse vingtaine de « sets ».
J’ai listé beaucoup de défauts, et on pourrait croire que je n’ai pas aimé le jeu, et pourtant, ce n’est pas le cas ! Mais c’est un open world Ubisoft, et je les connais depuis tellement d’années que j’ai du mal à imaginer quelqu’un n’y ayant jamais joué. Je prends toujours plaisir à parcourir des mondes vastes, explorer et découvrir, affronter des tas d’ennemis, récolter des tas de babioles un peu partout, et faire des activités finalement assez variées, mais aussi un peu répétitives. C’est à la fois assez générique et très addictif ; certains décrivent ces jeux comme des « everything games » : des jeux qui essayent d’être tous les genres et tous les styles en même temps, et réussissent à trouver un équilibre en ne prenant de risque dans aucun des domaines. C’est le genre de jeu que j’aime faire une fois par an, ou tous les deux ans, mais j’atteint vite l’overdose : cette escapade a été très bien le temps qu’elle a duré (37h en cherchant quelques améliorations), mais je n’en voudrais pas plus, en tout cas pas tout de suite.
Techniquement, sur Switch le jeu est évidemment largement inférieur aux autres plateformes (résolution basse et textures très compressées), mais reste très correct au vu de la machine, et la direction artistique « cartoon » et colorée permet d’en mitiger l’impact ; au moins, c’est assez fluide, mais j’ai subi 3 plantages qui m’ont obligé à relancer le jeu. La distance d’affichage au début du jeu est extrêmement basse, ce qui donne une très mauvaise première impression, mais elle s’améliore par la suite (c’est pour l’histoire).
A cheval entre Assassin’s Creed et Zelda, Immortals Fenyx Rising est agréable et bien réalisé, mais il a bien du mal à se démarquer de ses inspirations : j’ai été content de retrouver un open world Ubisoft moderne sur portable, que j’aime bien malgré tous leurs défauts, mais je n’ai pas pu m’empêcher de penser tout du long que j’avais envie de jouer à un « vrai AC » ou à Zelda.