Dredge est un mélange d’aventure, d’exploration, de pêche et d’horreur.
Sur le papier, le concept de Dredge est plutôt simple : on incarne un pêcheur à la dérive qui s’échoue près d’un village plutôt isolé, au milieu d’un ensemble d’archipels. On va simplement devoir pêcher poissons et crustacés et les revendre avant qu’ils pourrissent, mais aussi draguer diverses épaves pour remonter des matériaux qui permettent améliorer son navire, afin de pouvoir pêcher des poissons plus gros ou plus profonds, et recommencer. Derrière cette boucle simple et pas très excitante se cache un secret : l’archipel semble hanté par une force surnaturelle.
L’ambiance est directement inspirée des oeuvres de HP Lovecraft : des horreurs rôdent la nuit sans que l’on arrive à déterminer ce qu’elles sont ni quels sont leurs dangers, ni même ce qui est vrai ou ce qui est de la superstition, des abominations se piègent dans nos filets, et les gens deviennent progressivement fous en voyant des choses inexpliquées, ou inexplicables. Les habitants racontent tous des événements étranges et nous mettent en garde contre la nuit, ce qui fait monter le stress du personnage qui se met à voir des yeux et entendre des grognements dans le brouillard, mais aussi le notre, car on a souvent du mal à discerner le vrai du faux. Et prendre ces avertissements à la légère nous mènera facilement au fond de l’océan : si l’on veille trop tard, on finit par se faire attaquer par des monstres marins, et s’enfuir en panique nous mène bien souvent sur des récifs qui se matérialisent devant notre nez. Il faudra dormir pour faire baisser la jauge de stress et ne plus avoir ces hallucinations ; passer une nuit blanche oblige bien souvent à dormir une bonne partie de la journée le lendemain. Le tout est soutenu par une écriture de très bonne qualité, que ce soit par les dialogues, les messages en bouteille que l’on peut trouver, ou les événements que l’on peut croiser ; le ton est assez angoissant, mais aussi très mélancolique voire un peu triste par moment.
Le contenu est relativement restreint, avec seulement 5 petits archipels d’une poignée d’îles chacun : un central avec le village principal, ou avec des falaises, des coraux, etc. Dans chacun on trouvera des espèces de poissons différents, qui nécessitent du matériel adapté : il faudra changer les canes et filets installés sur le bateau de temps en temps pour pouvoir continuer à gagner de l’argent et compléter les quêtes. Ces dernières fonctionnent un peu toujours sur le même principe : aller dans une zone pour pêcher ou draguer un objet spécifique et le ramener à un PNJ, visiter un endroit pour activer un mécanisme, etc ; la variété n’est pas folle, mais l’histoire racontée est différent à chaque fois, ce qui limite un peu la répétitivité.
Explorer est une véritable expédition : on ne part pas à l’improviste sous peine de se faire couler, il faut planifier ses déplacements pour réussir à s’amarrer lorsque la nuit tombe. Au début le bateau est plutôt lent et ne permet pas d’aller bien loin, mais après quelques heures à récupérer des ressources pour acheter des améliorations notre rayon d’action s’étend, et avec l’habitude on peut faire des sessions de quelques jours « in-game » en quelques minutes « réelles » pour se faire un peu d’argent et récolter des matériaux afin de préparer un voyage plus lointain. Je l’ai fini avec les deux fins (la « bonne » n’est pas compliquée à obtenir) en 12h40 avec toutes les quêtes et toutes les améliorations, mais pas tous les poissons.
Dredge est un jeu très accessible : déjà, il n’est pas difficile, l’argent n’est jamais un problème, il y a très peu de chances de couler, et même lorsque ça nous arrive, on revient rapidement au dernier port visité ; si c’est quand-même trop difficile pour vous, ou trop stressant, le jeu propose un mode « passif » dans lequel les monstres n’attaquent pas. Il y a également quelques options d’accessibilité : on peut désactiver les « mini-jeux » de pêche, ou changer les couleurs de mise en avant du texte.
Graphiquement le jeu est dans un style un peu « low poly » que j’aime beaucoup, un peu comme Death’s Door ou Abzu. En revanche techniquement c’est moins joyeux : les chargements sont un peu longs, et si au début le jeu tourne plutôt bien, ça se dégrade progressivement selon les situations et les endroits, jusqu’à ramer vraiment beaucoup dans certains environnements ; heureusement que ce n’est généralement pas pénalisant au vu du peu d’action.
Dredge est un jeu paradoxal, à la fois relaxant par sa boucle de gameplay simple et détendue, et stressant par son ambiance oppressante et mélancolique ; le mélange en fait un jeu que j’ai beaucoup apprécié.