Behold The Kickmen est un jeu créé comme une blague, un troll envers les amateurs de foot, et il faut le prendre comme tel : un jeu codé rapidement, pour rigoler.
Afin de toucher le public extrêmement restreint des non-amateurs de foot qui seraient intéressés par un jeu de foot (dont je fais partie, comme quoi il existe), Behold The Kickmen intègre une histoire racontée sous forme de visual novel, pleine d’humour absurde et de situations improbables, avec une histoire de meurtre, des romances, etc. Il y a des remarques sarcastiques un peu partout, dans les menus ou le tutoriel, sur le statut de superstar des joueurs, ou bien leurs salaires. Le jeu se moque en permanence du sport, des joueurs, et des supporters : si vous êtes un gros fan de foot, ça vous fera peut-être grincer des dents, mais dans le cas contraire, ça fera souvent mouche, du moins au début, car l’histoire a tendance à faire un peu trop de sur-place.
Le jeu est clairement développé par quelqu’un qui n’a qu’une vague idée des règles du foot, et cherche volontairement à changer le peu qu’il en connaît : le terrain est rond, et le ballon rebondit sur les bords au lieu de partir en touche, et le reste est totalement farfelu : tirer de plus loin permet de marquer 2 voire 3 points, et il y a un système de « hors jeu » difficile à expliquer qui peut éliminer un joueur un peu au hasard. La seule règle qui est conservée, c’est l’interdiction de tacler les joueurs qui n’ont pas le ballon, ou le gardien.
Le gameplay est très simple, avec juste quelques boutons : courir, passer/tirer, tacler ou esquiver. Le feeling est très arcade, très nerveux et rapide, malgré la lenteur du déplacement des joueurs : les passes s’enchaînent à toute allure, les parties sont très courtes, la mi-temps se termine aussitôt commencée, et les joueurs ne passent pas plus de 5 secondes à célébrer un but. Ca ne s’arrête jamais, et on n’a pas tellement le temps de souffler. Les limites sont toutefois très vite atteintes lorsqu’on a fini de rigoler et qu’on veut réellement jouer, en particulier sur deux points. Le premier, c’est que la sélection du joueur actif est aléatoire et se fait rarement sur le joueur souhaité, voire même sur un joueur à l’autre bout du terrain : il est très fréquent qu’on se prenne un but uniquement parce que l’IA se fait une passe et le joueur actif ne change pas. Le second point problématique, c’est que la sélection du joueur auquel on va faire une passe est automatique et obligatoire : elle se fait sur le joueur le plus proche, mais pas toujours, et sans considération de marquage ni de position ; on est donc constamment en train de passer à l’adversaire ou en arrière sans le vouloir. Je rajoute enfin que le ballon est masqué par les joueurs qui remontent vers le haut du terrain, on passe donc la seconde mi-temps à essayer de deviner quel adversaire le possède, mais c’est un détail par rapport au reste.
Le mode principal de Behold the Kickmen est une carrière qui demande de progresser dans une ligue contre des adversaires de plus en plus forts, en débutant avec une équipe tellement nulle que les joueurs ne savent que tacler et tirer : on devra débloquer les autres mouvements au fil des matchs, et faire monter leurs statistiques qui partent de zéro, contre de l’argent que l’on gagne en marquant des buts après une action risquée. Cette carrière est cependant très mal équilibrée, et on doit dépenser un fric monstrueux pour améliorer les joueurs d’un pourcentage ridicule, alors que les adversaires deviennent très vite beaucoup plus forts. C’est rapidement la fête du grind, mais avec un gameplay aussi basique, on tourne très vite en rond, et c’est plus frustrant qu’autre chose.
L’IA est tellement mauvaise qu’elle mérite bien un paragraphe à elle toute seule. Les adversaires sont capables de se mettre des buts eux-mêmes, et il arrive très souvent qu’ils soient seuls face aux cages mais préfèrent passer en arrière plutôt que de marquer. Ils ne sont pas non plus cohérents dans leurs comportements, et peuvent passer la plupart du match à ne strictement rien faire, avant de s’énerver soudainement pour marquer 3 buts en quelques secondes, en faisant des passes dans tous les sens, de préférence juste avant la fin du match. Parfois ils font un semblant de construction d’action pour attaquer, et parfois ils passent au hasard à l’autre bout du terrain, sans aucune logique. L’IA alliée n’est pas en reste, et elle est absolument incapable de conserver une formation, de construire une attaque ou maintenir une défense. Et je ne parle pas des gardiens, aussi efficaces que des poulets sans tête. Le tout est couronné par des bugs à foison, avec des joueurs qui ont tendance à s’agglutiner les uns sur les autres comme une mêlée de rugby, ou à se bloquer contre les bords du terrain sans pouvoir en sortir.
Au final, entre les contrôles vexants, l’IA foireuse et le grind, le mode carrière devient assez vite infernal, malgré son histoire amusante quelques minutes. Tout ça ne serait pas nécessairement problématique, voire même plutôt rigolo, en partageant un écran avec un ami, mais c’est là où Behold The Kickmen chute lamentablement dans le ravin : il n’y a pas de mode multijoueur. Impossible de râler ensemble contre le jeu, impossible de jouer de mauvaise foi lorsque l’on perd : on ne peut que se borner à lentement transformer notre amusement des premières minutes en frustration. C’est totalement incompréhensible car c’est un jeu parfait pour du multijoueur local, et ça le rend très difficile à recommander.
Behold The Kickmen est un jeu amusant quelques minutes, surtout si on n’est pas fan de foot, paradoxalement. Malheureusement, ses nombreux défauts de gameplay et d’IA s’accumulent pour le rendre rédhibitoire en solo ; son manque de mode multijoueur est le clou final.