Karate Champ est un jeu de combat sorti en 1984, la même année que Punch Out, Karateka (sur Apple II), Urban Champion (sur NES), Competition Karate (sur Apple II), ou encore Kung Fu (sur ZX Spectrum) : comme vous pouvez le constater, les jeux d’arts martiaux et de boxe avaient la cote, surtout sur ordinateur, et concrètement, Karate Champ est tout simplement un des premiers jeux de combat.
La première chose à savoir, c’est que contrairement à quasiment tous les jeux de baston depuis Street Fighter 2, Karate Champ est une « simulation de karaté » : un arbitre compte les points, chaque touche donne un point (ippon) ou un demi point (waza ari) selon la réussite de la technique, puis les combattants s’arrêtent, se replacent, et reprennent le combat jusqu’à avoir 2 points, comme en vraie compétition (de l’époque).
Les techniques exécutées sont très réalistes et parfaitement reconnaissables : mae geri, mawashi, oi tsuki, gedan barai, uchi uke… Tout y passe, tout est crédible, on s’y croirait, et c’est assez dingue pour un jeu de l’époque. L’inconvénient, c’est que ça manque un peu de « fun » : il n’y a pas de boules de feu ou autres délires irréalistes à part des sauts périlleux difficiles à utiliser, l’adversaire est toujours le même, et il utilise les mêmes techniques que nous. La principale concession au réalisme, ce sont les rounds bonus entre chaque combat, comme casser des objets (pots de fleurs…) qui nous arrivent dessus, des piles de tuiles, ou frapper des taureaux.
Etant un des premiers jeux de combat, tous les codes du genre étaient encore à inventer, et Karate Champ se contrôle avec un système de double sticks pas du tout intuitif et très difficile à prendre en main : ce sont les combinaisons de directions entre le stick gauche et le stick droit qui définissent les coups portés. Par exemple, en maintenant le stick gauche vers l’arrière, ne pas toucher au stick droit permettra de bloquer, le stick droit vers l’avant fait un coup de pied retourné, tandis que le stick droit vers le haut porte un coup de poing. C’est déjà très difficile à mémoriser car non seulement les combinaisons n’ont pas toujours beaucoup de cohérence, mais en plus de ça, certaines combinaisons changent de résultat en fonction de la distance à l’adversaire ; et je ne vous parle pas de la latence : il faut attendre que les animations se terminent pour que le jeu considère qu’on a relâché le joystick. Les distances sont également très difficiles à trouver et il faut être très précis : la même technique avec le même résultat peut donner un demi point ou un point entier sans que l’on comprenne vraiment la différence.
Comme souvent dans les jeux d’arcade, Karate Champ est très dur, même au niveau le plus facile : les combats se font sur seulement deux points sans possibilité de continuer, ce qui ne laisse aucune place à l’erreur et aucune marge de manoeuvre. C’est rapidement frustrant, particulièrement avec ces contrôles qui donnent parfois l’impression de se battre plus contre ce que veut le jeu que contre l’IA, ce qui n’est pas très étonnant à cette époque, surtout au vu du niveau de complexité : on est loin de l’accessibilité de Punch Out. En plus de ça, il faut avouer qu’avec un seul personnage et un adversaire toujours identique, on tourne un peu en rond ; il reste cette volonté de progresser et d’avancer le plus loin possible, mais seuls les plus motivés y arriveront.
Techniquement, la réalisation est très correcte pour l’époque, avec de très bonnes animations même si tout est assez simple, et il y a même des voix numérisées pour compter les points et lancer les combats. On est, encore une fois, assez loin de l’excellence de Punch Out à ce niveau,
Lorsqu’on arrive à mémoriser les contrôles plus de cinq minutes, Karate Champ est très intéressant, très complet, et très bien fait ; avec des contrôles modernes, il pourrait encore être d’un très bon niveau. Il y a un vrai potentiel et un jeu technique retenu en arrière par ces contrôles d’un autre âge ; j’adorerais un remake indépendant moderne.